Edito : Le bon père de famille
Par Duncan R. Smith, Coordinateur, Comité de ligne 130a – 16/11/2020
Infrabel et moi n’avons clairement pas la même définition du « bon père de famille ».
Interrogé par TéléSambre pour le JT du 18 octobre dernier, concernant la dégradation du service voyageurs sur la ligne 130a (Charleroi-Erquelinnes), le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire belge s’est contenté d’un communiqué laconique rappelant que la mise des cinq ponts à voie unique était la seule alternative à la fermeture de la ligne. Ce faisant, Infrabel présentait son action comme celle d’un « bon père de famille ».
Ce n’est pas la première fois qu’elle utilise cette analogie pour défendre ses décisions concernant les ponts de notre ligne. Et elle ne manque pas de rappeler chaque fois que le problème fondamental a été le contexte budgétaire particulièrement défavorable de ces dernières années, ce que le Comité de ligne 130a ne conteste pas. C’est même rigoureusement exact.
Dans son action de tous les jours, le Comité œuvre d’ailleurs pour que les moyens financiers accordés à la SNCB et à Infrabel soient revus fortement à la hausse. Il s’aligne, ce faisant, sur les demandes posées par l’asbl navetteurs.be depuis de nombreuses années.
Mais nous avalons notre café de travers lorsqu’Infrabel se drape de probité pour justifier ses choix et parle de « bon père de famille ».
C’est que les bons pères – mais aussi les bonnes mères – de familles que nous sommes achevons le travail entamé. Nous, citoyens de la Haute-Sambre, ne sacrifierions jamais un patrimoine bâti sur près de 170 ans d’investissements. Combien d’argent public a-t-il déjà été dépensé pour mener la ligne 130a là où elle était encore il y a deux ans ? Combien de dizaines, de centaines peut-être, de millions d’euros ont-ils été déjà investis grâce aux contributions de nos aïeux, de nous-mêmes aussi, des décennies durant, pour que vive cette ligne de chemin de fer ?
Nous ne remplaçons pas les châssis de nos maisons par des moitiés. Le CEO d’Infrabel non plus, nous en sommes convaincus.
Et donc nous ressentons un certain mépris. Par la faute d’Infrabel, le service dont nous bénéficions, en tant qu’usagers de la SNCB, est très inférieur à celui dont profite la très grande majorité des autres voyageurs de son réseau, pour le même prix payé au kilomètre. La ponctualité de nos trains, surtout aux heures de pointe quand nous sommes les plus nombreux à bord, est plusieurs DIZAINES de pourcents en-deçà de la moyenne nationale.
Si Infrabel nous disait au moins : « Soyez patients, ce n’est qu’une question de temps… ». Mais non, aucune perspective ne nous est même suggérée.
Et donc les bons pères de famille que nous sommes ne laisseront pas Infrabel, adolescente impudente, ruiner notre patrimoine sans même nous regarder dans les yeux.